Le contexte
D’un point de vue juridique, nous conseillons à nos clients de soulever l’argument de la force majeure vis-à-vis de leurs partenaires contractuels avec prudence et précaution. L’appréciation de la justesse de ce motif se fait au cas par cas.
Aussi, chaque contrat concerné devrait être analysé individuellement.
Prenons comme exemple le cas, devenu aujourd’hui assez fréquent d’un industriel de la région Auvergne-Rhône-Alpes ne recevant plus de livraisons de son fournisseur chinois et qui ne peut donc plus livrer ses propres clients.
Beaucoup d’entreprises de la région sont concernées par le Coronavirus car les mesures de quarantaine ralentissent ou interrompent les cycles de production en Chine.
Beaucoup de fournisseurs chinois essaient d’invoquer la force majeure auprès de leurs clients. Comment doit-on réagir si des contrats ne peuvent plus être exécutés par les entreprises à cause du Coronavirus ?
Le Coronavirus comme cas de force majeure ?
Des épidémies peuvent constituer un cas de force majeure. Certains contrats contiennent une clause de force majeure qui prévoit expressément une telle situation.
En l’absence d’une clause contractuelle, en droit français, l’article 1218 du code civil , modifié par Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 – art. 2 prévoit :
« Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.
Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »
Notre analyse pratique
1. Nous estimons qu’un arrêt de production sur des sites en Chine peut constituer un cas de force majeure.
Il existe par ailleurs des mesures nationales permettant de soutenir un tel argument. Les administrations chinoises en charge du commerce extérieur ont délivré des certificats à des entreprises chinoises afin de pouvoir justifier qu’elles ne peuvent plus exécuter leurs contrats pour des raisons indépendantes de leur volonté et leur contrôle.
2. Nous vous conseillons de vérifier vos contrats. Si votre entreprise ne peut plus exécuter certains contrats avec ses clients pour les raisons indiquées ci-dessus, vous devrez vérifier si vos contrats prévoient une clause de force majeure et si cette clause est suffisamment large pour couvrir un tel cas.
3. À défaut, l’article 1218 du code civil s’applique et ses conditions doivent être vérifiées :
– situation imprévisible ?
– empêchement insurmontable ?
– indépendant de votre contrôle ?
Une analyse au cas par cas s’impose avant d’invoquer une exonération de responsabilité pour cas de force majeure dont la survenance ne mettra pas automatiquement fin à votre contrat et ne vous ne libèrera pas de toute obligation.
Conséquence d’un cas de force majeure
Il convient de noter qu’avant d’invoquer un cas de force majeure, l’entreprise a l’obligation d’avertir dans les meilleurs délais son co-contractant en indiquant l’événement qui empêche l’exécution et la durée prévisible de l’impossibilité d’exécution. Le défaut d’avertissement ou de notification risque de vous faire perdre le droit d’invoquer la force majeure.
Conseils Pratiques
Nous vous recommandons fortement d’évoquer clairement la situation avec votre client. L’argument de la force majeure peut servir de base de négociation afin de trouver une solution acceptable pour les deux parties.
In fine, nous vous conseillons de vérifier si vos contrats contiennent une clause de force majeure et d’analyser sa rédaction.
Nous sommes à votre disposition pour analyser chaque cas individuel et les conséquences juridiques applicables.
Christoph Martin RADTKE et Marion LINGOT
Droit International
Fiducial Legal by Lamy