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L ’ A C T U A L I T É J U R I D I Q U E 2 0 1 8 P A R F I D U C I A L L E G A L B Y L A M Y | 49 (Cass. com., 1 er févr. 2011, n° 10-13.595 : JurisData n° 2011-001018 ; Banque et droit 2011, n° 137, p. 28, obs. Th. Bonneau ; JCP E 2011, 1394, n° 23, obs. J. Stoufflet ; RTD com. 2011, p. 394, obs. D. Legeais. – V. déjà, Cass. com., 7 juin2006, n°04-18.211 : JurisData n° 2006-034086) . Auparavant, elle avait également pu admettre que les créances cédées soient dési- gnées dans un document distinct dès lors qu’il est joint (Cass. com., 3 oct. 2006, n° 04-30.820 : JurisData n° 2006-035334 ; Banque et droit 2006, n° 111, p. 25, obs. Th. Bonneau ; D. 2006, p. 2371, obs. V. Avena-Robardet) . Toujours sur le plan formel, mais de façon assez différente, le cédé reprochait au cessionnaire de ne pas lui avoir notifié la cession à domicile élu, conformément à une clause du contrat conclu entre le cédant et le cédé. Les juges se montrent parfois fermes quant à l’identification du ces- sionnaire. Ainsi, un bordereau faisant référence à « l’agence République du Groupe Hervet » plutôt qu’à « la Banque Hervet » a été jugé non conforme à l’article L. 313-23 (Cass. com., 23 oct. 2001, n° 98-20.442 : JurisData n° 2001-011414 ; D. 2002, jurispr. p. 2046, obs. J. Lemée ; RD bancaire et fin. 2002, comm. 56, obs. A. Cerles) . Mais, la ques- tion était ici très différente puisqu’il ne s’agissait pas de se prononcer sur le respect des mentions obligatoires de l’article L. 313-23, mais sur le point de savoir si, quant au lieu d’exécution de la notifi- cation, le cédé peut opposer au cessionnaire une clause du contrat l’unissant au cédant. Alors que le marché de travaux prévoyait en effet que la notifi- cation devrait être effectuée au domicile élu par le cédé, en l’espèce son siège social, elle fut adressée au centre des paiements du débiteur. Pour le cédé, il y avait là une exception inhérente à la dette qu’il lui était possible d’opposer au cessionnaire. L’argument est toutefois écarté par les juges, qui se sont placés sur un tout autre terrain. La cour d’appel est en effet approuvée d’avoir retenu que le cédé « avait eu une connaissance effective de la notification de la cession et ne pouvait se méprendre sur les conséquences de celle-ci ». Si l’article R. 313-15 du Code monétaire et financier contient des indications précieuses sur le contenu de la notification, il est absolument muet quant au lieu auquel elle doit être effectuée. Néanmoins, dans la mesure où il prévoit que la notification peut être faite par tout moyen, on peut considérer que l’essentiel est d’être en mesure de rapporter la preuve que le cédé a effectivement pu prendre connaissance de la notification. De manière générale, si le formalisme n’est pas sans utilité, il doit toutefois être cantonné dans de strictes limites et ne doit pas conduire à rendre des actes inefficaces alors qu’aucune des parties n’a pu se méprendre sur leur sens ou leur portée. Par ailleurs, s’agissant tout spécialement de la clause d’élection de domicile, la formalité requise était imposée non par la loi, mais par les parties à un contrat auquel le cessionnaire demeure tiers. Il est donc bienvenu que l’exigence d’une notifi- cation à domicile élu n’ait pu lui être opposée. La clause en question pourrait en effet, en bien des cas, recéler un piège à son égard et l’admettre serait méconnaître les finalités de la cession Dailly. Dans le même esprit, on comprend parfaitement que la Cour de cassation n’ait pas fait produire d’effet à la clause restreignant la cessibilité des créances issues du marché de travaux. 2. LA FORCE DU PRINCIPE DE LIBRE CIRCULATION L’opposabilité au cessionnaire des exceptions nées antérieurement à la cession permet-elle au cédé d’invoquer une clause du marché de travaux imposant un préavis minimal avant toute cession ? On pouvait le penser au vu d’un arrêt de la chambre commerciale rendu le 22 octobre 2002, dans lequel elle indiquait que « le débiteur cédé qui n’a pas accepté la cession de créance peut opposer à l’établissement de crédit cessionnaire les exceptions fondées sur ses rapports personnels avec le cédant » exception qui, en l’espèce, cor- respondait à une interdiction faite aux créanciers de céder leurs créances et présente au sein des conditions générales du cédé (Cass. com., 22 oct. 2002, n° 99-14.793 : JurisData n° 2002-016135 ; RTD civ. 2003, p. 129, obs. P. Crocq) . Il faut tou- tefois indiquer que la jurisprudence a pu paraître hésitante sur la question, puisque précédemment, dans un arrêt du 21 novembre 2000, elle s’était appuyée sur l’effet relatif des conventions pour considérer que le cessionnaire n’était pas engagé par la clause d’agrément présente dans le contrat liant le cédant au cédé et ainsi priver d’efficacité la stipulation interdisant toute cession sauf accord du cédé (Cass. com., 21 nov. 2000, n° 97-16.874 : JurisData n° 2000-006944 ; Defrénois 2001, n° 10, p. 635, note crit. M. Billiau) . Depuis, le législateur est venu prévoir que sont « nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un com- merçant, un industriel ou un artisan, la possibilité (…) d’interdire au cocontractant la cession à des tiers des créances qu’il détient sur lui » (C. com., art. L. 442-6, II, c) . En l’espèce, la Cour de cassation n’a mobilisé ni le principe d’opposabilité des exceptions ni l’effet relatif des conventions aumoment de se prononcer sur l’efficacité de la clause litigieuse. Elle procède en effet par substitution de motifs, indice supplé- mentaire, au surplus de la publication de l’arrêt, de l’autorité qu’elle entend attacher à cette décision. Pour la cour, « une cession de créance profession- nelle effectuée selon les modalités prévues par les articles L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier produit ses effets et est opposable aux tiers ainsi qu’au débiteur cédé dans les conditions De manière générale, si le formalisme n’est pas sans utilité, il doit toutefois être cantonné dans de strictes limites et ne doit pas conduire à rendre des actes inefficaces alors qu’aucune des parties n’a pu se méprendre sur leur sens ou leur portée.
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